L'école ne s'arrête pas aux portes de l'hôpital !
Depuis les années 1980, une unité d’enseignement au sein du service de pédiatrie permet aux enfants hospitalisés de poursuivre leur scolarité, malgré la maladie ou l’accident.
Rencontre avec Nathalie, professeure des écoles, qui explique comment l’apprentissage devient un outil de guérison et de résilience.

Un métier au carrefour de l’éducation et du soin
Nathalie est professeure des écoles, mais pas dans une école classique. Depuis la rentrée 2023, elle exerce au CHU de Nîmes, dans le service de pédiatrie générale, où elle accompagne les enfants hospitalisés dans leur parcours scolaire. Elle n’est pas seule : un deuxième enseignant intervient au pôle psychiatrique, preuve de l’importance accordée à la continuité pédagogique pour tous les jeunes patients.
Son rôle ? « Permettre aux enfants de 3 à 17 ans de maintenir un lien avec l’école, atténuer les conséquences de l’interruption des cours et faciliter leur retour en classe ». Employée par l’Éducation nationale, elle travaille en étroite collaboration avec les équipes médicales : « Ici, l’enfant n’est pas seulement un patient. En le remettant en position d’élève actif – alors que la maladie le place souvent en situation de passivité –, on contribue à son processus de guérison ».
« L’école à l’hôpital, c’est un contexte très différent de l’école classique. Le faible effectif et la prise en compte de chacun font que les enfants se sentent plus rapidement à l’aise ».
Une école adaptée à chaque enfant
Chaque jour, Nathalie compose avec l’imprévu : « Mes élèves ne viennent pas toujours à moi, alors c’est moi qui vais à eux ». Quand un enfant ne peut quitter sa chambre – à cause d’une fatigue intense ou d’un protocole médical strict –, la classe se déplace, « Je m’installe au chevet avec mon sac de livres, de jeux éducatifs ou un ordinateur portable. Même 15 minutes de lecture ou un exercice simple peuvent faire la différence ». L’école s’adapte au rythme de l’hôpital, où les soins restent la priorité absolue.
Les groupes, eux, se forment au fil des disponibilités, « Un matin, j’ai trois écoliers et un lycéen ; l’après-midi, deux collégiens et un petit de maternelle », peu importe la configuration, l’objectif reste le même : placer chaque enfant en situation de réussite. « Pour les plus jeunes, on privilégie le ‘lire, écrire, compter’ avec des outils de remédiation ou des jeux. Pour les ados, on aborde tous les domaines du socle commun de compétence, en suivant leur progression dans le programme ou en ciblant leurs lacunes ». Et si un enfant n’a pas la concentration pour une leçon traditionnelle, une histoire à écouter ou une œuvre à commenter, une discussion sur un sujet qui les passionne leur est proposé : l’essentiel est qu’ils repartent avec un sourire et l’envie de revenir.
« Même pour ceux qui refusent au début, je propose de venir voir la classe, de faire un essai. Très souvent, une fois la porte franchie, l’enfant adopte la posture d’élève et oublie un instant sa maladie ».
Un partenariat essentiel avec les soignants et les familles
Le fonctionnement de l’école à l’hôpital repose sur une étroite collaboration avec les équipes médicales. « Deux fois par jour, je consulte les soignants pour identifier les enfants aptes à participer. Ensuite, je vais à la rencontre des familles pour leur présenter l’école et ses bénéfices ».
Les réactions sont variées : certains parents et enfants adhèrent immédiatement, d’autres sont plus réticents, surtout en cas de difficultés scolaires ou de mal-être psychologique. « Dans ces cas, je m’appuie sur les soignants pour convaincre, ou je propose un temps d’essai réduit. La valorisation des réussites, même petites, est essentielle pour les motiver à revenir ».
Pour les longues hospitalisations, Nathalie contacte les enseignants de l’école d’origine, récupère le travail à faire via l’ENT ou les familles, et organise même le passage d’examens nationaux (DNB, Bac) en collaboration avec le rectorat.
« Encouragez votre enfant à venir à l’école, même s’il n’en a pas envie. Très souvent, il en ressort content, avec le sentiment d’avoir progressé et d’avoir oublié, le temps d’une séance, qu’il était malade ».


Un remède contre l'ennui et le découragement
Et si l’école aidait à guérir ?
« C’est un espace où l’enfant redevient acteur de sa journée », explique Nathalie. « Même 30 minutes en classe peuvent tout changer : ça rompt l’isolement, ça redonne du rythme, et ça fait passer le temps plus vite ».
De plus, participer à la classe est l'occasion pour le jeune patient d'échanger sur son hospitalisation avec ses camarades du jour : il peut alors ressentir une forme de solidarité et relativiser ses inquiétudes.
Une classe où chacun a sa place
Entre jeux pédagogiques et projets collectifs, « on avance à votre rythme », promet Nathalie. « L’important, c’est de sortir de la chambre et de se dire : ‘Je suis encore capable' . Et souvent, ceux qui arrivent en traînant les pieds repartent en demandant : ‘Il y a école demain ?’ » .
— preuve que l’école, même à l’hôpital, reste un lieu de découvertes et de sourires.
Un conseil ? « Proposez à votre enfant d’essayer une fois. Vous serez surpris de voir comme cette parenthèse lui fera du bien ».
Des projets pour l’avenir
Nathalie souhaite développer des projets autour de l’écriture et de l’éducation à la citoyenneté, notamment sur la gestion des émotions : « Les émotions conditionnent l’accès aux apprentissages. Une anxiété trop forte peut bloquer le processus cognitif. Apprendre à les gérer, c’est améliorer la concentration et la confiance en soi ».
Elle envisage aussi de participer à nouveau à la Semaine de la presse à l’école, pour aider les jeunes à décrypter l’information et à développer leur esprit critique – un enjeu crucial à l’ère des réseaux sociaux et de l’intelligence artificielle.
L'école en Pédiatrie
En pratique :
- Les lundis, mardis et jeudis aux horaires scolaires classiques.
- Pour tous les enfants hospitalisés en pédiatrie, de 3 à 17 ans, avec l’accord du corps médical.
- Nathalie est joignable directement dans le service ou via les soignants.
L’école à l’hôpital, c’est bien plus que des cours : c’est un espace de vie, de partage et de résilience, où chaque enfant peut continuer à grandir, malgré la maladie.
Pour en savoir plus, n’hésitez pas à vous renseigner auprès des équipes soignantes du service de pédiatrie du CHU de Nîmes.